Ni imprudence ni erreur fatale du débutant, juste la faute à un rocher qui s’est décroché au mauvais moment, au mauvais endroit. Le 3 août, Olivier Bonnet est mort tandis qu’il pratiquait l’alpinisme accompagné d’un guide renommé dans le massif du Mont-Blanc, du côté de la dent du Géant (4 013 m). Olivier Bonnet était une personnalité à Chamonix (Haute-Savoie), le patron de la marque Simond, implantée dans la région depuis cent cinquante ans et spécialisée dans le matériel de montagne et d’escalade. Il disait : « J’aime la montagne 365 jours par an. »
Cette année encore, il fait trop chaud et trop sec dans les Alpes. Des températures parfois proches de zéro au sommet du mont Blanc (4 810 m), des 35 °C à Chamonix (1 000 m) et des montagnes qui partent en miettes s’en retrouvent défigurées et sont de plus en plus dangereuses pour l’homme. Partis le 7 août, trois Italiens, deux frères et la compagne de l’un des deux, ont aussi trouvé la mort dans le couloir Chevalier, le sol s’étant, semble-t-il, dérobé sous leurs pieds. Les gendarmes partis à leur recherche ont raconté s’être fait « mitrailler de pierres ».
Le permafrost se détériore
La dégradation du permafrost, c’est l’autre traduction dramatique, moins connue que la fonte des glaciers, du réchauffement climatique sur les hauts sommets. Le permafrost désigne un sol ou une roche dont la température se maintient en dessous de zéro degré sur de très longues périodes. En haute montagne, il permet la création de glace qui joue le rôle de ciment dans les fissures des parois. Or, depuis plus d’une quinzaine d’années, le permafrost se réchauffe et déstabilise les parois, qui se décrochent.
Parfois, un simple rocher tue des alpinistes chevronnés. D’autres fois, des pans entiers de montagne se détachent, arrachant tout sur leur passage. Comme en Suisse, le 23 août 2017 : trois millions de mètres cubes sont tombés sur le glacier situé en dessous, provoquant une avalanche rocheuse, puis une coulée de boue de six kilomètres qui a dévasté le village de Bondo. Heureusement, grâce à un système d’alerte mis en place par les autorités, les habitants ont pu être évacués à temps. Mais huit randonneurs ont été emportés par la vague.
L’orage menace en cette fin d’après-midi d’août à Argentière, village de carte postale qui domine Chamonix. Il fait 30 °C à 1 250 m d’altitude. Ambiance pesante dans la salle où Ludovic Ravanel, 36 ans, membre de la Compagnie des guides de Chamonix et chercheur au CNRS, détaille les raisons de la dégradation du permafrost. Il diffuse des vidéos terrifiantes, des millions de mètres cubes de roches qui dévalent des flancs de montagnes en Alaska, en Nouvelle-Zélande, dans les Alpes… Les spectateurs poussent des cris d’effroi.
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